Éoliennes : comment convaincre face à leur pollution visuelle ?
Alternatives plus écologiques aux énergies fossiles (charbon, fioul, gaz naturel…), les énergies renouvelables ont la cote. Bien sûr, aucune n’est exempte d’inconvénients : l’hydraulique, le solaire, la biomasse ou encore les éoliennes font l’objet de critiques et d’interrogations légitimes (coût, stockage, capacité à répondre à la demande, recyclage, etc.). Néanmoins, en ce qui concerne l’énergie éolienne, revient un sujet relativement inédit. Il s’agit de la pollution visuelle engendrée par ces grandes machines, accusées par beaucoup de nuire aux paysages.
Les éoliennes en marche provoquent aussi une pollution sonore, mais ce problème fait l’unanimité : le bruit a des répercussions sur notre bien-être et peut considérablement affecter notre santé.
L’argument de détérioration du décor rural peut davantage surprendre. Face à l’enjeu environnemental, auquel on ne peut répondre sans une transition énergétique efficace, il y a comme un déséquilibre entre les avantages escomptés – bien que discutables et bourrés d’inconnues – et le désagrément évoqué. Imaginons que la pollution visuelle puisse être avérée de façon objective : ferait-elle le poids à côté du potentiel des éoliennes ?
Deux mondes qui s’opposent ?
Il est essentiel de prendre du recul. Ce débat met en scène deux groupes aux codes bien différents (bien sûr, cette distinction grossière mériterait plus de nuances via une étude sociologique) :
- Le premier, plus jeune et urbanisé, a développé une conscience écologique parfois dès la naissance, avec une approche plus mondialisée et technologique. Pour lui, la défense de notre planète revêt une importance fondamentale. Ainsi, la perspective d’une énergie décarbonnée et renouvelable vaut largement les désagréments visuels des éoliennes. D’autant que celles-ci poussent évidemment peu en métropole.
- Le second, plus âgé, voit la ville empiéter inexorablement sur sa campagne. Loin d’être hostile à l’écologie, il y contribue plutôt via des méthodes locales et simples, dont il a l’habitude depuis toujours. Ce groupe est très attaché à la beauté et à l’authenticité du territoire ; l’apparition de piliers et d’hélices de plusieurs mètres d’envergure ne satisfait pas vraiment ce critère d’esthétisme.
Il n’y a pas de bon ou mauvais camp. Pas deux mondes qui s’opposent entre des dictateurs de l’environnement et des réfractaires bornés. Seulement des priorités que la vie a ordonnées différemment. D’ailleurs, cette affirmation dépasse de loin l’exemple des éoliennes ou même du changement climatique. Elle vaut pour de nombreuses situations où, malheureusement, la société pousse à la simplification voire au manichéisme.
On peut souhaiter développer les énergies vertes ET préserver l’authenticité des paysages. Mais un traitement efficace de la question des éoliennes passe par la compréhension de toutes les parties prenantes. Et pour se comprendre, pas besoin de grandes innovations : les mots suffisent.
Écouter, s’exprimer, dialoguer
L’objectif n’est pas de convaincre que les bénéfices des éoliennes l’emportent sur le charme d’une plaine naturelle. D’abord, cette source d’énergie – ou du moins cette technologie – doit encore prouver sa valeur à grande échelle (puissance, rendement, matériaux nécessaires…). En outre, contester le facteur esthétique revient à négliger ce qui constitue pour beaucoup de gens un critère majeur de bonheur, sinon de bien-être. D’après la Convention européenne du Conseil de l’Europe, le paysage représente même une « composante essentielle du cadre de vie des populations » et un « fondement de leur identité », devant être considéré dans l’ensemble des politiques mises en oeuvre.
De manière générale, l’important est d’apprendre à communiquer autour d’un thème – le développement durable – qui prendra de plus en plus d’ampleur dans les années, décennies (siècles ?) à venir. Apprendre à ne pas opposer des mots mais à échanger des points de vue, et se mettre à la place de son interlocuteur.
Faisons preuve d’empathie, la clé pour ne pas tomber dans un dialogue de sourds. Cette empathie permet également de se trouver des points communs et plus seulement des divergences. Certes, cela s’applique à celles et ceux qui souhaitent sincèrement trouver une solution gagnant-gagnant et pas simplement détruire un adversaire, souvent par écran interposé.
Surtout, sortons de nos certitudes. La vie manquerait de saveur si tout le monde partageait le même avis, mais elle serait de bien mauvais goût si personne n’en changeait. Ne soyons pas des imbéciles et arrêtons de partir du principe que l’on a raison et l’autre tort. Les problématiques énergétique et environnementale méritent vraiment mieux qu’un affrontement stérile.
+ de réflexions :
Article 5 de la convention européenne du paysage (https://rm.coe.int/168008062a) : « à reconnaître juridiquement le paysage en tant que composante essentielle du cadre de vie des populations, expression de la diversité de leur patrimoine commun culturel et naturel, et fondement de leur identité «
Merci pour cette précision, nous allons l’ajouter à l’article.